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Le nœud de vipères

Aujourd’hui, je vous propose de découvrir – ou très certainement redécouvrir, pour la plupart – un des romans de François Mauriac paru en 1932, le nœud de vipères.


C’est l’histoire d’un homme, un vieil homme qui est au bout de sa vie. Il semble d’ailleurs être au bout de tout, cet homme. Tellement au bout qu’il est l’image même de la solitude, malgré la présence de sa femme, de ses enfants et de ses petits-enfants autour de lui. Ce vieillard se sent menacé par toutes ces personnes, au point qu’il élabore un plan pour les priver de ses richesses. Alors il leur écrit des lettres, parce qu’il veut que ceux-ci comprennent sa rancœur. Il écrit pour se justifier, et peu à peu on découvre à quel point son aigreur n’est qu’une immense tristesse de ne pas avoir rencontré l’Amour vrai dans sa vie. Son avarice même n’a plus rien à voir avec de l’argent, il est simplement égoïste de générosité. En captant tout ce qui lui appartient, il espère malgré lui déceler la seule chose qui compte vraiment, un acte gratuit d’amour à son égard. Et le voilà qui trépigne et s’enfonce inexorablement dans l’interprétation des moindres faits et gestes de son entourage pour mieux se plaindre de l’échec de l’Amour. Jusqu’à ce que… Mais je vous laisse découvrir ce qui lui arrive.


Ce qui me plait dans ce livre, c’est tout d’abord qu’il est très bien écrit. Il y a une telle finesse dans la manière qu’a Mauriac de décortiquer l’insalubrité des relations familiales qu’il faut admettre que tout cela est, malheureusement, bien réaliste. Et c’est justement la valeur de cet ouvrage, qui nous permet de constater combien dangereuses et corrosives sont la concupiscence, l’envie et surtout la suffisance. J’ai aussi trouvé revigorant de constater, à travers toutes ces accusations, combien le désir de Dieu est fort chez ce vieillard, comme le montre la citation suivante :


« Demain, il se peut que je renie ce que je te confie ici, comme j'ai renié, cette nuit, mes dernières volontés d'il y a trente ans. J'ai paru haïr d'une inexplicable haine tout ce que tu professais, et je n'en continue pas moins de haïr ceux qui se réclament du nom chrétien; mais n'est-ce pas que beaucoup rapetissent une espérance, qu'ils défigurent un visage, ce Visage, cette trace? De quel droit les juger, me diras-tu, moi qui suis abominable? Isa, n'y-a-t-il pas dans ma turpitude je ne sais quoi qui ressemble, plus que ne fait leur vertu, au Signe que tu adores? Ce que j'écris est sans doute, à tes yeux, un absurde blasphème. Il faudrait me le prouver. Pourquoi ne me parles-tu pas? Pourquoi ne m'as-tu jamais parlé? Peut-être existe-t-il une parole de toi qui me fendrait le cœur? Cette nuit, il me semble que ce ne serait pas trop tard pour recommencer notre vie. Si je n'attendais pas ma mort, pour te livrer ces pages? Si je t'adjurais, au nom de ton Dieu, de les lire jusqu'au bout? Si je guettais le moment où tu aurais achevé la lecture? Si je te voyais rentrer dans ma chambre, le visage baigné de larmes? Si tu m'ouvrais les bras? Si je te demandais pardon? Si nous tombions aux genoux l'un de l'autre? »


Si donc vous avez l’occasion de croiser ce roman, n’hésitez pas ! ça vaut le détour…


Bonne semaine !

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